prédication par Catherine Golfier le 18 août 2024

sur Jean 6,51-58
Jean 6, 51-58

51Moi je suis le pain vivant descendu des cieux. Si quelqu’un mange de ce pain, il vivra pour toujours. Le pain que je donnerai pour que le monde vive, c’est ma chair. »52Là-dessus, les Juifs se disputaient vivement entre eux : « Comment cet homme peut-il nous donner sa chair à manger ? » demandaient-ils. 53Jésus reprit : « Oui, je vous le déclare, c’est la vérité : si vous ne mangez pas la chair du Fils de l’homme et si vous ne buvez pas son sang, vous n’avez pas la vie en vous. 54Celui qui mange ma chair et qui boit mon sang possède la vie éternelle et je le ressusciterai au dernier jour. 55Car ma chair est une vraie nourriture et mon sang est une vraie boisson. 56Celui qui mange ma chair et qui boit mon sang demeure uni à moi et moi à lui. 57Tout comme le Père qui m’a envoyé est vivant et comme je vis par lui, de même, celui qui me mange vivra par moi. 58Voici donc le pain qui est descendu des cieux. Il n’est pas comme celui qu’ont mangé vos ancêtres, qui sont morts. Mais celui qui mange ce pain vivra pour toujours. »

Ces quelques versets constituent le dernier volet du long discours de Jésus , prononcé
dans la synagogue de Capernaüm et consacré au « pain de vie ».
Ce chapitre 6 s’est ouvert par un récit de multiplication des pains où, à la différence
des autres évangiles, c’est Jésus lui-même qui fait la distribution. La foule reconnaît
en lui le nouveau Moïse, le Messie qui doit venir dans le monde.
Puis après l’intervalle de la nuit où il marche sur la mer face aux disciples, il veut
dissiper les incompréhensions de la foule qui voudrait le faire Roi.
En fait, elle n’a vu dans la multiplication des pains que le miracle matériel qui a
permis de satisfaire la faim, mais non le signe que Jésus est le « pain de vie ».
Je dois avouer que j’ai longuement hésité à choisir ce texte du jour por la
prédication !!
Bien sûr que la Parole de Dieu est la nourriture spirituelle qui nous permet de tenir le
cap dans nos traversées du désert. Mais là,…… Jésus nous fait tomber du ciel de
spiritualité où il nous avait entraînés.
« Le pain que je donnerais , c’est ma chair »
Cette rupture soudaine m’a précipité dans la perplexité et même l’horreur, oui
l’horreur !! Je ne sais pas ce qu’il en est pour vous.
L’allusion à des pratiques anthropophagiques est sans ambiguïté possible !
La question des Juifs qui l’écoutent
« Comment celui-là peut-il nous donner sa chair à manger ? »
est parfaitement justifiée. Mais Jésus y répond en insistant lourdement : non content
de parler de la chair du Fils de l’Homme, il parle aussi de boire son sang !!
Et au cas où nous n’aurions pas compris, il en rajoute encore : c’est sa propre chair,
sa chair réelle qu’il s’agit de manger ; c’est son propre sang, son sang réel qu’il s’agit
de boire !!
N’oublions pas que pour les Juifs le sang est un aliment hautement prohibé par la loi
de Moïse et c’est un blasphème que Jésus prononce là.
Et en guise de bouquet final, il finit par affirmer :
« Celui qui me mangera vivra par moi «
Qu’il s’agisse de la condition d’accès à la vie éternelle n’y change rien, au contraire !
C’est bien la vie éternelle que le prince Dracula cherche à obtenir quand il boit le
sang de ses victimes ! C’est bien leur force vitale que les cannibales cherchent à
s’approprier quand ils mangent la chair des plus valeureux de leurs ennemis vaincus !
En fait de « pain de vie » descendu du ciel , on peut dire que Jésus nous fait tomber
de haut !!
De toute manière, manger la chair et boire le sang ne peut être compris que de la
manière la plus blasphématoire ! Jésus emploie ici un langage impie et , répétons-le,
blasphématoire, sinon répugnant à des oreilles juives et sans doute aussi aux nôtres.
Tout aussi choquésMais ne serait-ce pas pour signifier que sa mise en croix sera elle
aussi impie, blasphématoire et répugnante, mais que c’est par un tel acte que le salut
est donné aux hommes. Salut dont jamais le caractère impie ne doit être oublié.
Nous ne sommes pas les seuls à trouver ces propos rudes et d’une insoutenable
crudité. Les disciples sont en effet tout aussi choqués que les autres auditeurs et
beaucoup d’entre eux vont partir et ne plus suivre Jésus.
Ce matin, je ne vais surtout pas vous dire que j’ai compris ce passage. Mais je vais
essayer de cheminer dans ce texte avec vous pour que chacun puisse se faire une
opinion au sujet de ce discours.
Nous savons bien que cette question de la présence réelle ou spirituelle du corps de
Jésus dans la Sainte Cène ou l’eucharistie est une cause de division parmi les
chrétiens.
Mais est-ce vraiment sur la réalité de ce sacrement que Jésus voulait attirer l’attention
de ses auditeurs ? Ou bien ce discours sur le pain de vie est-il le moyen pour Jésus de
dire quelque chose sur sa personne ?
En effet la foule est à la recherche de Jésus. Elle a été étonnée par le miracle de la
multiplication des pains. Elle cherche à en savoir plus sur l’identité de celui qui a été
capable d’un tel miracle, d’un tel partage.
La foule se doute que cet homme n’est pas un homme ordinaire, mais elle ne sait pas
où le situer dans son rapport avec Dieu. Elle veut bien suivre Jésus , mais elle
demande à nouveau un signe pour croire . Le miracle de la multiplication des pains
n’a pas suffi.
Jésus fait alors le parallèle entre l’épisode de la manne au désert et le véritable pain
de vie. Le pain de vie , c’est celui qui vient de Dieu.Ici, il n’y a pas de différence
entre le pain de vie et la manne, car tous deux viennent du ciel. Mais Jésus ajoute que
ce pain donne la vie au monde.. Il est donc plus puissant que la manne puisqu’il agit
sur le long terme, jusque das la vie éternelle.
C’est pourquoi la foule semble intéressée :
« Donne-nous de ce pain-là »
Mais elle ne s’attend pas à cette réponse.
Le pain de vie n’est plus la manne ou un quelconque substitut de pain, mais il est
incarné en la personne de Jésus..
Jésus vient du Père. Il est descendu dans notre humanité pour nous faire accéder à la
vie éternelle.
Jésus précise la volonté de Dieu. Il veut ressusciter tout le monde. Mais il y a une
condition : il faut croire au Fils, il faut croire en Jésus.
C’est lui, Jésus, qui est la révélation du Père au sein de notre humanité.
Jésus est le seul à donner la vie éternelle. Mais pour cela il faut croire. Et Jésus en
parlant de la vie éternelle, parle de son sacrifice. Il a donné sa chair et son sang pour
que nous ayons la vie. Le pain de vie qu’il nous offre trouve son fondement dans sa
mort sur la croix. C’est toute sa personne qu’il donnera sur la croix. Pour accéder à la
vie éternelle, il faut reconnaître ce don total du Fils de Dieu, qui est aussi Fils de
l’Homme. Ce don total passe par le don de la personne toute entière, chair et sang.
Dans ce discours à la foule, Jésus invite son auditoire à voir dans sa personne le Fils
de l’Homme, celui qui est descendu du ciel, celui qui va faire le don total de sa
personne sur la croix, pour que nous puissions accéder à la vie éternelle.
Sa préoccupation est de se faire connaître et reconnaître comme le Fils de Dieu,
l’envoyé de Dieu.
Aujourd’hui encore, nous sommes face à cette demande de reconnaissance.
Acceptons-nous de croire en ce Dieu qui s’est fait homme, en ce Dieu qui est mort
sur la croix, en ce Dieu qui a fait couler son sang pour nous donner la vie éternelle ?
Le chemin que Jésus propose ne correspond pas à ce que de nombreux disciples
espéraient et ils le quittent. Ce chemin est trop scandaleux ! Est-ce que notre vie
éternelle est au prix d’un sacrifice du Fils de Dieu ? C’est en tout cas la réponse de
Jésus. Que nous l’acceptions ou pas, le salut de l’humanité est au prix de ce sacrifice.
Lorsque nous lisons aujourd’hui(hui ces versets, nous voyons d’avantage une allusion
à la Sainte Cène. Chacun pourra recevoir ce texte comme une explication du sacrifice
de Jésus ou bien comme une explication de la présence réelle de Jésus dans la Céne
ou dans l’eucharistie.
Chaque église pourra jusqu’à la fin des temps, parler de présence réelle ou de signe
du don total de Jésus et nous savons combien cette question divise les chrétiens !
Mais, ce qui nous relie, dans notre compréhension du ministère de Jésus, c’est de
comprendre que nous sommes tous au bénéfice de son sacrifice. Jésus est réellement
mort pour nous. Son corps a réellement été brisé pour nous. Et son sang a été
réellement versé pour que nous puissions accéder à la vie éternelle.
Pleins de cette assurance, agissons dans nos vies, non pas comme si cette vie nouvelle
n’était pas acquise, mais comme si elle coulait déjà dans nos corps, dans nos paroles
et dans nos actes.
Amen.

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